La Provence Mathieu Asselin : au cœur du scandale de Monsanto

ête du photographe Mathieu Asselin dénonce les ravages de la firme américaine Monsanto. Un reportage édifiant

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Mathieu Asselin dévoile les dégâts économiques, écologiques et sociaux provoqués par Monsanto depuis les années 40.PHOTOS VALÉRIE FARINE

Des images chocs. De celles qui ne peuvent pas laisser insensibles. Des clichés représentant des villes ravagées par la pollution, des générations d'enfants handicapés, des familles frappées par la perte d'un ou plusieurs proches. Ces photos et ces témoignages ont été constitués par le Franco-vénézuélien François Asselin après une enquête de cinq ans. La première du photographe spécialisé dans le documentaire. Son projet est présenté au Magasin électrique et a fait l'objet d'un livre "Monsanto : une enquête photographique", publié par Actes Sud. La réalité est saisissante, poignante.

Dès les premiers clichés, en couleur, c'est une maison dévastée qui interpelle le public. Une bâtisse située à West Anniston, en Alabama, abandonnée en raison du taux de contamination au PCB. En face se dresse la maison du futur imaginée par Monsanto, à Disneyland. Près de 3 000 km séparent les deux sites. Le contraste est étonnant. "C'est celui entre le futur que Monsanto nous a vendu et celui qui existe, explique le photographe. Pourquoi cela ne se répétera pas ?" Cette ville fantôme laisse un sentiment de désespoir, de défaite. Des gens évoquent leur désarroi. En dépit des 700 millions de dédommagements versés par la firme, ils n'ont pas pu partir. Ils attendent sans aucune chance de voir leur destin changer, évoluer.

Des documents d'archives pour compléter l'expo

 

À côté des photographies, des archives complètent le terrible récit de ces vies détruites. "Ces documents m'aident à expliquer l'histoire, à la faire comprendre au public, indique Mathieu Asselin. Cela prouve que Monsanto savait qu'ils contaminaient". Ce fut le cas au Viêtnam, avec "l'agent orange". Les effets de ce puissant défoliant fabriqué par Monsanto et déversé par l'armée américaine de 1959 à 1971 sur le sud du Vietnam se reflètent dans les prises de vue du photographe franco-vénézuélien. Il dévoile la réalité brute. Des foetus déformés dans des bocaux, des enfants victimes de malformation ou encore des témoignages de familles touchées par le décès de proches, vétérans de l'armée peuvent heurter. "C'est important de tout montrer car l'histoire contemporaine de Monsanto est tout aussi dangereuse", indique le photographe, qui consacre la dernière partie de son enquête à l'agroalimentaire et aux produits phytosanitaires.

Là encore, les témoignages font apparaître la détresse des fermiers en procès contre le géant américain ("Monsanto est hyperviolent, il les casse moralement, financièrement") ou encore l'incroyable histoire de la ville de Sauget, vampirisée par la firme américaine dont le siège est situé à proximité. "C'est l'un des sites les plus contaminés aux États-Unis", souligne Mathieu Asselin, qui s'appuie encore sur des documents scientifiques. À travers cette expo, le photographe dévoile une histoire sombre, méconnue, même si le nom de Monsanto ne l'est plus. "C'était un challenge", reconnaît-il. Un pari relevé avec brio, comme en témoigne le succès de son enquête lors des Rencontres. Quant à savoir quelle sera la réaction du géant américain, Mathieu Asselin admet que la firme "a d'autres poissons plus gros à ferrer même s'ils aiment faire des exemples. Sam Stourdzé et Jean-Paul Capitani ont été courageux en présentant mon travail".

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Aucun témoignage de la firme américaine n'est présent lors de l'exposition. Mais la voix de Monsanto n'est pas totalement absente de l'enquête de Mathieu Asselin. Le géant est visible à travers des publicités, des articles couvrant près d'un demi-siècle d'activités, des années 40 jusqu'à la fin des années 80. "C'est une manière pour eux de se présenter car les contacter ne m'intéressait pas", avoue le photographe. Un couloir présente la plupart de ces documents avec des slogans qui donnent la chair de poule. "Quarante ans plus tard, on se dit : mais c'est quoi cette folie ! lisse le photographe. Ils vendent une histoire fausse. C'est de la propagande".


L'exposition est visible au Magasin électrique, situé dans le Parc des ateliers, jusqu'au 24 septembre. Tarif : 12 €.

 

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